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Rani M’riguel !

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Rani M’riguel !

C’est la phrase qui a le chic de me faire bondir : «Wach, aâmou ? Riglaouek ?» Je ressens aussitôt cette sensation bizarre de ne plus être un humain, mais plutôt une vieille horloge comtoise, un moteur déglingué de tacot ancien et toussoteux ou pis, un Nokia 3310 déposé chez le réparateur pour la 3311e fois en 25 ans d’utilisation. Ce qui est la moyenne pour ce modèle mythique. M’enfin ! Aâmou riglaouek ! C’est des façons de parler à son oncle, ça ! Et puis d’abord, je ne suis pas ton oncle ! J’ai beau tourner et retourner les pages déjà fortement tourmentées de mon livret de famille, consulter mon arbre généalogique, avec un sécateur à la main, pour, le cas échéant, couper ta branche au cas où je tomberai dessus, mais rien ! J’en suis donc là à me lamenter de ce genre de formules tarabiscotées, m’en plaignant même à vous, lorsque des amis lectrices et lecteurs m’ont un peu rassuré en me narrant avec force détails les expressions qui font désormais notre quotidien et dont eux aussi souffrent en silence. A l’image de Badjaja qui ne supporte pas d’aller au resto et de s’entendre dire dès l’entrée, par le serveur : «Wach, El Hadj ? Chafouk ?» Je viens au resto pour me faire voir ou pour manger, triple buse ? Ibiza, elle, c’est le label «Ch’riki» qui la met hors d’elle. Elle me jure être fonctionnaire et n’avoir jamais fondé de société ni n’avoir eu d’associés dans la vie, hormis son mari. Farida et Nora, ce qui les fait partir en vrille, c’est le mot «El Hadja». D’office, comme ça, de part et d’autre d’un comptoir d’épicerie, de boulangerie ou de toute autre échoppe, on t’embarque de force dans un avion, et hop ! Direction La Mecque où tu deviens d’autorité Hadja ou Hadj ! En vérité, je me plains, je chipote, je grogne et fais l’ours mal léché, mais au fond, bien au fond de ma rage en grande partie feinte, je l’aime bien ce «langage» des miens, des Dézédiennes et des Dézédiens. Je lui trouverait même un brin d’ingéniosité géniale et linguistiquement rafraîchissante. N’est-ce pas Ya Cheikh ? Je fume du thé et je reste éveillé, le cauchemar continue.

 

Publié par Hakim Laâlam/ Le Soir d'Algérie

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