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Malgré la cécité, Ahmed BEKKA continue d'éclairer la société...

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Ahmed Bekka, non voyant depuis l’âge de 14 ans, Il continue de travailler avec son handicap. Tout comme s’il était tout à fait normal, en innovant, en créant la joie autour de lui, il était également très populaire :

 

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Ahmed Bekka fut cet homme plein d’espoir, de courage et d’abnégation. Il fut aussi cet homme qui ne savait compter que sur soi-même, et, cela depuis son jeune âge. Souvent, marginalisé et isolé. Donc, instinctivement, il était là, présent avec toujours son incapacité. Certaines familles maudissaient indirectement leurs enfants à cause de l’handicap et où la cécité qui les caractérisent. Et, lorsque le mis en cause devient adulte et même encore plus, les données changent et s’agencent complètement comme par enchantement !

Ahmed Bekka est né le 29 avril 1946 à Ain Defla. Père de deux enfants, il avait contracté la cécité à l’âge de 14 ans et plus précisément en 1959. Les causes principales quoi ont conduit à son handicap. Un jour il avait voulu aider sa mère pour débarrasser d’un tas de cendre déposé par ma mère. J’avais ramassé ces cendres avec mes mains nues et je l’ai jeté dehors, depuis, mes yeux commençaient à me picoter, à me faire mal, je ressentais beaucoup de douleurs avec une espèce d’irritation que je n’arrêtais pas de gratter. Et depuis, du Taleb au médecin et du toubib aux hôpitaux. Après 1962, De plus en plus, et graduellement, je ne voyais presque plus. Ensuite le verdict est tombé comme un couperet. L’handicap de la cécité était irrévocable et totalement définitif.

Sans titre 5Cette déclaration ne m’avait jamais alarmée ou effrayé en tant qu’enfant ou du moins stoppée dans mes capacités qui étaient éclatantes et prodigieuses à mon jeune âge. Cette déclaration ne m’avait même pas effleurée l’esprit. Personnellement, je continuais à jouer avec mes camarades, le jeu constituait pour moi, ma vie, ma situation vis-à-vis de mes copains et aussi, il était tout ce que je possédais. Ce qui était encore étonnant, c’est que j’étais le meneur et également l’initiateur de l’ensemble des jeux. Mes amis ne pouvaient donc se passer de moi. Donc, on était complémentaire ce qui m’avait d’ailleurs fait oublier que j’étais un non-voyant. La réalité, c’est que je ne voyais pas mais je n’éprouvais aucun sentiment de gène en ce qui concerne ma cécité. Je me considérais comme étant un enfant tout à fait normal. Peut être parce que cette non voyance m’avait donné des ailes et m’avait procuré également cette force et cette vigueur qui me permettaient de me surpasser à travers tout ce que je faisais.

Je commençais tout d’abord à imiter mes copains sur tout qu’ils faisaient, je ne m’avouais jamais vaincu et c’est toujours comme cela que commença ces histoires invraisemblables me concernant. Conduire une bicyclette tout seul, en faire les roulettes ainsi que d’autres combinaisons de façon tout à fait ordinaire. Ensuite, le jeu du domino, avait pris une grande place dans ma vie et sur lequel personne ne pouvait me battre que ce soit en duo ou en en équipe.

Nous étions intraitables avec mon ami d’antan qui s’appelait Abdallah Kastali. Le jeu de domino nous prenait tout notre temps, des rencontres jusqu’à minuit, les voisins et les spectateurs venaient de tous les bords pour apprécier le jeu mais aussi pour découvrir un non-voyant qui jouait au domino avec une aisance très particulière. Il se souvenait de tout. Des pièces sur le tapis et les autres qui étaient en l’air. Il dominait tous ses camarades et cela pendant tous les soirs. Pour contempler et voir la technique du jeu du domino. Nos amis et les spectateurs étaient étonnés voire abasourdis de me voir sortir toujours vainqueur. J’aimais les défis et je les ai tous gagné.

Durant plusieurs années, le domino était notre jeu favori, une émission (Sabahiette) de la télévision de la RTA de l’époque était venue filmer les péripéties du jeu de domino mais en réalité, c’était moi l’intrigue. C’était peut être ma force, ma témérité et surtout l’audace qui m’animait et me propulsait toujours comme gagnant. Je ne voulais surtout pas me sentir faible devant mes copains. Eux, ils ne cessaient de m’encourager et c’est peut être que c’était eux qui m’ont donné cette hardiesse et cette assurance afin de me permettre de me surpasser et réussir.

J’aimais aussi chanter, à l’époque un style propre à la région (1968-1974) je composais des chansons à Belkhayati Mohamed, chanteur très connu dans la région, il chantait des chansonnettes d’amour qui galvanisaient ses fans, tout cela était très à la mode. J’étais le président de l’association de l’union des non voyants et cela jusqu’à aujourd’hui.

Au niveau du fameux stade Dekiche (actuellement cité Nedjma) un stade où fut le théâtre de plusieurs rencontres de football, du matin au soir, c’était aussi notre seul activité sportive. J’avais mon équipe qui s’appelait RAAD, composée de : Tennessi Mohamed - Raja M’hamed - Bekka Djillali (frère) – Yekhlef Ahmed – Hamamine Djelloul – et moi-même. Et j’étais de surcroit un titulaire indiscutable. Certes, je ne voyais pas le ballon mais, cette envie de vouloir jouer, peut être grâce à mon instinct et surtout par le biais de mon cœur et le reste suivait. je marquais des buts, je dribblais, je faisais également des passes décisives.

Sans titre 75C’était peut être invraisemblable et incroyable et aussi surprenant mais cela était vrai et réelle. Je suis devenu, par la suite, au niveau des inter-quartiers initié par le regretté Rachid Rezekallah et ses amis (1974-1980) le président de ma nouvelle équipe WERP (Itihad Riadhi de la Palestine) équipe où j’étais un joueur indiscutable. Cette équipe était composée de : Ferahi Mohamed dit Banus – Mazouzi Djilali – Boucherit Mustapha – Bekka Ahmed – Kabli Djilali – Tahar Lakouas –Bechaa M’hamed–Bechaa Djilali et Aggoun Djelloul. La particularité de notre ami Ahmed, c’est qu’il se rappelle aussi des noms comme des prénoms de ses amis, de ses voisins.

Il se souvient des prénoms de personnes qu’ils connaissait juste après avoir prononcé un mot ou bien une phrase et cela après de longues années, c’est vraiment incroyable, mais vrai ! Sa grande spécificité est qu’il possède une mémoire étonnante comme celle d’un éléphant. C’était peut être cela qui le faisait différencier des autres copains. Cette particularité lui donnait beaucoup d’aisance pour se rappeler de ces souvenirs ou bien tout simplement de ces faits simples et élémentaires pour lui. Mais combien difficile pour nous.

Le jeu de domino et la pratique du football, nous ont comme même appris, plus tard, comment gagner notre croûte, comment faire pour travailler et songer aussi à notre avenir. Comment devenir responsable de soi et s’adonner au travail.  Je vendais au niveau de l’hôpital d’Ain Defla diverses choses (légumes, fruits et biscuits).En 1983/1984, le jeu de domino m’avait permis, encore une fois, de trouver une place dans l’hôpital en tant que standardiste, par la suite, j’ai bénéficié d’une formation de standardiste à Batna et plus précisément à l’école du CFPA de Tazoule, et c’est là-bàs que j’ai appris les rudiments du métier de standardiste.

J’ai été recruté au niveau (1983-1984) Je suis resté à l’hôpital jusqu’à ma retraite, durant ce parcours, j’ai travaillé en tant que standardiste et aussi en tant qu’agent chez le médecin de ORL pour faire passer les malades non voyants au toubib des yeux.

J’ai, vécu pendant longtemps sans voir mais j’ai passé tout ce temps sans être vraiment gêné par cette cécité. Ma détermination, mon audace et surtout ma ténacité à vouloir toujours aller vers de l’avant avaient peut être joué en ma faveur. Rien qu’en entendant la voix d’un proche, d’un ami que je n’avais pas vu depuis longtemps, je reconnaitrais aussitôt sa voix et en l’appelant par son nom. Dès fois, des amis à moi que je n’avais pas vu depuis longtemps me testaient pour voir si je vais les reconnaitre ou non, et, ils seront toujours étonnés parce que je sors toujours vainqueur des défis et épreuves lancés contre moi. Avec mes amis, j’allais de temps en temps faire la pêche et je réussissais à en pêcher quelques pièces, dès fois on revenait bredouille. Et la vie continue.

Questionné sur ses petits enfants. Oui, ils sont jeunes, dit il, par rapport à mon âge, il dira que lui-même était une charge pour sa famille alors comment pouvait-il avoir ce privilège de se marier ? Plus tard, il était marié avec une non-voyante et qui n’a pas eu d’enfants. Quelques années après, elle était morte. Ensuite, Ahmed Bekka s’était de nouveau marié avec une femme normale et il a eu deux enfants (6 et 10 ans). Si j’étais marié très jeune, mes enfants seraient grands et adultes maintenant. Ils auraient pu m’aider et m’accompagner dans la vie. Je n’ai plus l’âge et la force de les entretenir. Je le fais avec amour mais difficilement.

Devenu, malgré lui, un inconditionnel supporter du club local (SCD) Il vivait les péripéties du match grâce aux cris et critiques des supporters, il lançait lui aussi des remarques et boutades aux joueurs et à l’arbitre après les avoir entendus autour de soi. C’était comme cela qu’il aimait supporter le SCD, c’était sa manière à lui. Je souhaite à mes enfants, ma famille et mes amis le bonheur, la santé et la réussite, il ne faut jamais s’avouer vaincu sinon c’est la banqueroute. Je souhaite également aux personnes de l’hôpital avec lesquels, j’ai passé de bons moments et souvenirs. A ces anciens amis qui m’ont toujours épaulé et encouragé. Je souhaite que le bureau de l’association de l’union des non voyants de la wilaya sis Hay Sidi Maamar Khemis Miliana ouvre ses portes incessamment.  

En tant qu’ancien footballeur, Ahmed Bekka avait bien voulu dire quelques mots sur la violence qui règne sur les stades. La violence dans les stades est une forme de non respect au football. Les gens qui pratiquent cette violence ne connaissent rien au football ni à ses enivrements. La violence émane toujours des responsables et dirigeants sans scrupules. Le football est un sport saint, donc, il faudrait l’entourer avec des gens simples et saints. Le football restera toujours cette attraction grandiose et nul ne pourra y changer la donne.

Par DEGHRAR Djillali

Commentaires

  • keryma
    • 1. keryma Le 01/05/2017
    Cher Djillali,

    Tes sujets sont toujours très intelligents et intéressants, même si parfois je ne les commente pas, dis-toi bien que je les lis avec beaucoup d'attention et affection , tu es un ami que j'apprécie énormément.
    Il est vrai que certains moments après les commentaires de cette sublime Chantal, je ne peux m'avancer de quelque écrit par complexe peut-être, elle trop forte! (fo po lui diiire)

    Amitiés,
    Kéryma,
  • Miliani2Keur
    • 2. Miliani2Keur Le 28/04/2017
    Djilali Chapeau bas

    pour ces portrait a méme la sociéte comme plus aucun regard n'en porte, il faudrait dix comme toi par commune pour que notre sociéte se reconcilie avec soi même, je ne sais pas ou tu trouve cette énergie mais surement chez ces gens simples vivants, vrais!

    saha l'ami, la lecon...
  • djilali deghrar
    • 3. djilali deghrar Le 27/04/2017
    Ferhaoui et Chantal, bonsoir

    C'est à grâce à des personnes comme vous que l'inspiration me soit donnée de façon continue.Je vous remercie de lire mes sujets et de les commenter. c'est très gentil à vous.

    Djilali qui vous adore tous et sans exception
  • ferhaoui
    • 4. ferhaoui Le 26/04/2017
    bonjour tout le monde ou que vous soyez depuis oran. mon cher ami djillali il y a quelques années en arrières j'ai lu un de vos papiers sur un journal au sujet des non- voyants...vos écrits comme toujours sont passionnants comme je les aime de par le choix et les réflexions souvent qui nous interpellent, en tout cas, je suis heureux de vous lire et de vous retrouver chez notre amie noria.... l'ami, ferhaoui oran.
  • Chantal
    Bonjour à tous,

    Quelle merveille de lire cette rubrique ! Cet homme est exceptionnel !

    Bravo à vous, Ahmed ! Quelle belle leçon de vie vous nous donnez à tous : voyants et non-voyants.

    Merci Djillali de nous avoir fait découvrir la pugnacité hors du commun d'Ahmed.

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