Où es-tu, Alger de ma jeunesse ?/ Par B.Mohamed (Chevalley)
Pourquoi ce soudain sentiment de tristesse, cette mélancolie, alors que je suis pourtant avec des amis, qui me sont chers, sur une terrasse d'un endroit que j'aime, place Audin, sous un soleil radieux. La rue Didouche Mourad, avec ses environs, est pour moi un endroit particulier où j'ai vécu de merveilleux moments et si j'ai, parfois, la mélancolie, ce n'est pas parce que je ne les revivrais pas mais parce qu'on a changé, enlaidi ou fait disparaître des lieux où s'exprimait la joie de vivre, celle d'une période si particulière, si excitante de notre vie.
Exit Le Coq Hardi, avalé par les travaux du métro. Qui ne se souvient pas du Coq Hardi, le bar-restaurant situé au bas de la rue Didouche, avec sa splendide terrasse ronde.
A quelques encablures, rue Charras, il y avait Marhaba, un autre lieu privilégié de notre jeunesse. Dans cette rue Charras, à proximité du Capri, nous dégustions, chez un boulanger-pâtissier quelques morceaux de pizza dont la saveur n'a jamais été égalée même avec l'intrusion, à profusion, de la pizza italienne.
La «Brass» (Brasserie des Facultés) a certes rouvert, reconstruite, après de longues années de délaissement et de délabrement mais ce n'est plus la même, ni cette terrasse où on regardait les gens passer pendant qu'on mangeait. Qu'est devenu Gaspard ? Et Champion, notre boxeur intarissable conteur ? Que devient ce cher «Philippe», la mascotte de la rue Didouche, qu'il égayait avec ses refrains yé-yé et son art de mettre de l'ambiance partout où il passait. Je pense à Mus, gauchiste de première heure, dès le lycée, demeuré fidèle à ses convictions contre vents et marées, et à notre incomparable poète humaniste Djamel Amrani, qui hantait ces lieux. Ah ! Que l'on me permette d'évoquer ses quelques vers.
« J'appréhende la chape - Où nous nous exilons - La cendre approfondit l'entaille déserte - De nos chevets - Serions-nous autre chose qu'aujourd'hui ? - Depuis longtemps - la pluie nous a avalés Vifs.»
Le Lotus, lieu de prédilection des Palestiniens, le Fidélia, antre des «Usmistes» (joueurs et fans de l'USMA), toujours habillés dernier cri et séchoir s'il vous plaît ! et de Yahia oulid lebled jusqu'au bout des ongles, le Nevé des jeunes dandys comme Zinou, le brun ténébreux, grand tombeur et amoureux, tout comme moi, du grand Chabab des Lalmas, Khalem, Achour, le Bristol, plutôt celui des antiusmistes, etc...Quel est l'étudiant ou jeune homme des années 1960-1970 qui n'a pas goûté aux délices de La Mère Michel, ce petit restaurant en bas de la rue Serpaggi. On y mangeait tellement bien, à très bon prix dans une ambiance plus que conviviale.
En face du cercle Taleb Abderrahmane (ex-Otomatic) trônait La Cafétéria, «la Cafette», on la fréquentait moins mais c'était une fameuse adresse. Elle vient de subir des travaux d'embellissement et sa gestion est confiée à une vieille connaissance des adeptes de Bacchus, celui qui porte un chapeau melon et, qui tôt le matin, choisit, lui-même, au marché de Meissonier les meilleurs poissons.
Les bons restos pullulaient, comme la Colomba, Djenina, le Bardo, Victor-Hugo, Saigon, le restaurant vietnamien,et..., avec parfois des escapades à la rue Larbi-Ben-M'hidi (ex-Isly) à l'Halambra, au-dessus du «défunt» Bon Marché, où Slim, le père de Zid ya Bouzid, venait chercher son inspiration, au Novelty ou au Normand (est-ce bien l'appellation exacte ?). C'étaient nos «hauts lieux» de la révolution, là où on faisait et on défaisait le monde. Au fait, tous ces souvenirs, au parfum gastronomique, m'ont donné faim et si on montait en haut de la rue Didouche goûter de délicieuses sardines chez Mustapha (j'espère qu'il existe toujours et qu'il n'a pas subi le sort d'Amédée, du boulevard Mohammed V, car cela fait si longtemps que nous n'y avons pas mis le pied).
On s'arrêtera d'abord au Romano, où l'indéboulonnable Dahmane n'est plus, déguster un thé et revoir quelques anciennes têtes.
Les anciens du secteur des transports qui ne veulent pas croire aux effets du temps, sont toujours présents, toujours à l'affût des nouvelles ou à en propager comme aux plus beaux jours. Ce ne sont que quelques bribes de souvenirs de quelques lieux parmi tant d'autres mais si merveilleux !...
Commentaires
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- 1. Jacdur kazack Le 30/10/2018
Bonjour,
J'ai beaucoup aimé l article de Mohamed de Chevalley dans lequel il évoque des souvenirs de jeunesse a Alger plus précisément la rue Didouche. En le lisant j avais l impression de l avoir croisé dans ces endroits qui me sont tellement familiers. Par contre je suis un peu déçu par certains commentaires dont les auteurs ont tendance à nous faire croire que ce qui arrive a Alger est par la faute des nouveaux arrivants allant jusqu a les traiter de krarcha. Je ne suis pas Algérois de souche. Ceux qui se prétendent Algérois aujourd'hui sont tous venus de quelque part. Alger est une ville cosmopolite a l instar de toutes les capitales du monde. Il y faisait bon vivre à l époque parce que notre société était encore tolérante. Les gens allaient au cinéma, au théâtre, fréquentaient les bars et les boîtes de nuit. Tout cela a disparu parce que l école fondamentale a travers nos gouvernants a inculqué d autres " valeurs " contraires à celles de leurs parents et grand-parents. Ce qui a créé une sorte de schizophrénie chez nos citoyens et surtout parmi les jeunes. Ils rêvent tous d aller à la Oumra, ce qui ne les empêche pas d essayer par tous les moyens de partir en Europe. Pourquoi plus précisément l Europe me dira t on? Tout simplement parce qu' ils veulent vivre même s il leur est difficile de s adapter au style de vie européen. Quitte à se contenter de voir les gens vivre. Je garderai toujours ces images récentes d Alger le soir du réveillon ou la police se déploie a chaque coin de rue comme si e elle se préparait à une guerre alors qu' a part certains privilégiés qui s octroient le droit de festoyer et de célébrer cette soirée comme ils se le doit. Tous les autres osent à peine aller dans de petits restaurant ou pizzerias briser la routine du train train quotidien. -
- 2. néné Le 11/02/2017
Bien bonjour à vous kéryma,tout comme vous,je suis à l'étranger où je vis voila déjà quelques années,je suis bien triste que vous soyez seule, croyez moi cet éloignement je le ressens tout les jours même si je suis ici avec ma petite famille, je descends à Alger tout les ans,et à chaque fois je reviens le cœur gros et triste de voire à quels points les choses se dégradent la-bas,je ne parle pas seulement de matériels,mais plus de comportement humain et notre manque de civisme, à chaque fois je me pose la question comment on en est arrivé à ça ??? mon rêve et de retourner vivre à Alger,on ne manquera certes de rien mais est ce raisonnable d'infliger ça à mes enfants,vu le niveau de l'enseignement maintenant , je suis montée dans un taxi lorsque j'ai eu la chance d'en trouver un qui veuille bien nous prendre, même avec l'intervention d'un policier il y avait un qui nous a carrément demandé de descendre dés qu'on s'est un peu éloigné car j'ai refusé de payer el coursa et lui ai dit d'enlever son compteur et le No du taxi ,enfin Le gentil taxieur m'a dit en parlant de sa fille qu'il n'avait remarqué qu'elle ne savait ni lire ni écrire qu'une fois au collège car comme tout ces camarades, elle faisait des cours chez sa sois disant enseignante qui à défaut de transmettre un savoir gonflée les notes de ses élèves, quel joli leurre,de la poudre aux yeux pour les parents surtout pour ceux qui font confiance, suivent le mouvement et se contentent de payer sans demander des comptes,le business est devenu un quotidien,des chipas ils les demandaient sans gêne par tout à commencer dans les ports ou les aéroports, j'en suis malade que l'on soit réduit à rien, plus de Nif,plus de Redjla,plus de horma Rabbi y djib saate el khir et nous donne une prise de conscience sur les choses essentielles dans cette vie.Mes sincères amitiés à tous . -
- 3. Kéryma Le 09/02/2017
Bonjour tout le monde,
Un bonjour particulier à vous néné, j'ai lu le grand article de B.Mohammed, mais je me suis plus attardée sur votre écrit à vous!
Je le trouve très émouvant, car moi qui n'habite plus au pays depuis des années, je ressens la même chose que vous, surtout que lorsque l'on se retrouve seul(e) et que l'on regarde par sa fenêtre, et après avoir lu cet article entre autres, tous les souvenirs remontent et font mal sans en ressentir la douleur heureusement... les larme sont là moi je pleure un bon coup et je retourne vaquer à mes occupations, je ne sais si vous vivez loin du pays ou seulement d'Alger mais le sentiment est le même ou... Pas!
Amitiés,
Kéryma -
- 4. néné Le 07/02/2017
Si Mohamed B de chevaley,j'ai pleuré en vous lisant, la rue Didouche (Michelet) est le quartier ou j'ai grandi et vécu et mon adresse encore aujourd'hui où vit ma maman,je ne saurais mieux d'écrire que vous si ce n'est juste rajouté quelques autres merveilles d'Alger si chères à mon cœur, El-biar où je suis née et la maison de mon grand -père,milk bar ou on prenait un grenadine avec mon père qui était déjà à l'époque sans complexe allait partout avec ses filles même au stade allah y rahmou wa iwassae a lihe, le balcon de St Rafael,St Eugène chez ma grand-mère maternelle,El casbah chez les tantes de mon papa, la rue du Golf chez mon oncle......tout était beauté à l'époque que l'on se promène à pied ou en voiture,aujourd'hui même les voisins ne sont pas les mêmes,je ne suis contre personne, mais quand je vois notre Alger ce qu'ils en ont faits vivement qu'ils soient restés chez eux, ça rendrait service à tout le monde même à eux même car au lieu de s'adapter à la ville, c'est la ville qui s'est adaptée à eux,par la grâce de ceux qui gouvernent, ils ont tout fait pour que l'Algérois et les Algérois disparaissent,tout est laideur,comme toutes l'Algérie d'ailleurs à leurs image ces kerrarcha comme disait mon père, Allah la terabehoume ils nous ont tout confisqué jusqu'à nos souvenirs car en vous lisant je me suis rendue compte que beaucoup de choses commencent à s'effacer de nos mémoires, merci à vous M.Mohamed B de Chevaley pour ce merveilleux retour au passé et ce rappel, pour moi c'est un merveilleux hommages à ces personnes que j'ai cité et à celles que vous M.Mohamed B de Chavaley vous avez citées, quelques unes on a connu et d'autres reconnu et qui malheureusement beaucoup nous en quittaient Allah y arhamhou. -
- 5. bradai Le 27/01/2017
C'etait si merveilleux à Alger ce temps Si merveilleux !... Le seul mot qui nous reste à dire et à redire de ce temps ...
@ Mohamed B de Chevaley J'ai lu ta belle jeunesse en ecoutant cette belle chanson https://youtu.be/41PRSETKmsg qui me rappelle un autre temps de ma jeunesse que j'evoque à chaque fois pour completer celle qui fut si merveilleuse pour toi aussi.
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