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Aâmi Saïd, le vendeur de You You

Dans la rue de la Casbah, à Zoudj Ayoune, c’était là que nous, enfants du quartier, nous nous retrouvions chaque jour, attirés par la même scène, la table de Aâmi Saïd. Au cœur de la rue, il installait son petit stand en bois, une table simple mais tellement spéciale pour nous. Les « Pommes d'Amour », ces fruits enrobés de sucre rouge brillant, étaient un véritable trésor. On pouvait sentir la douce odeur du sucre à distance, et cela nous attirait irrésistiblement, comme si chaque bouchée nous promettait un peu de magie. Aâmi Saïd, avec son sourire habituel, criait :  « Pommes d'Amour ! Oranges et pommes enrobées de sucre, tout frais ! »

Dès que nous entendions sa voix, nous accourions tous, bousculant les plus petits pour arriver les premiers. C'était notre moment à nous, l'occasion de goûter à une douceur qui n’avait pas de prix.

Le vendeur de You You

Les pommes et les oranges, avec leur sucre rouge qui brillait sous le soleil, semblaient plus belles que tout ce que l’on pouvait imaginer.Aâmi Saïd, toujours calme et patient, nous tendait son bâtonnet de bois, et, en un instant, nous croquions dedans, savourant le goût sucré qui nous envahissait. C’était simple, mais c’était le plus grand des plaisirs.

Pomme d'AmourMais ce n’était pas seulement une histoire de bonbons. La table d’Aâmi Saïd était un carrefour pour nous, les enfants de Zoudj Ayoune. On venait pour les pommes d'Amour, mais aussi pour discuter, observer, et sentir l’atmosphère particulière de la rue de la Casbah. Parfois, les adultes se mêlaient à nous, s’arrêtaient eux aussi, et, contre toute attente, prenaient une pomme d'Amour comme nous. C'était comme une tradition qui se passait de main en main, sans jamais s’altérer. Chaque rencontre autour de la table d’Aâmi Saïd était un petit moment de convivialité, de partage.

Les « Pommes d'Amour » d’Aâmi Saïd n’étaient pas seulement un produit. Elles étaient le symbole d’une époque, d’une enfance partagée. C’était le plaisir simple mais essentiel, celui qui nous rassemblait tous, enfants de Zoudj Ayoune. Même quand d’autres sucreries arrivaient dans les rues, on revenait toujours à ces pommes et oranges, comme un rituel que rien ne pouvait remplacer. Parce qu’au fond, c'était plus qu'un goût sucré, c’était un morceau de notre enfance, de notre quartier.

Aujourd'hui, tout a changé. La table d’Aâmi Saïd n’est plus là, et la rue de la Casbah n’est plus tout à fait la même. Les visages ont changé, les ruelles aussi. Mais, chaque fois que je repasse dans cette rue, je revois sa table, et j’entends presque sa voix dans le bruit de la rue :  « Pommes d'Amour ! »
Les « Pommes d'Amour » d’Aâmi Saïd ne sont plus là, mais leur souvenir reste intact. Et moi, comme tous les enfants de Zoudj Ayoune, je fais partie de ce passé, de ces moments simples et précieux, qui continuent de vivre dans ma mémoire, comme un goût sucré que le temps ne pourra jamais effacer.

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